dimanche 29 juin 2014

Contre-objections à la double constitution : réflexion sur le sens du processus constituant


La proposition de donner à l’assemblée constituante le mandat de rédiger une constitution indépendantiste et une constitution provinciale soulève des objections pertinentes. Celles-ci doivent être absolument prises en compte pour saisir non seulement la dimension idéologique de la stratégie, mais les conséquences pratiques du processus constituant. Je remercie d’ailleurs les commentaires critiques d’Anton Walbrook qui permettent d’approfondir la réflexion collective et de dénicher les pièges potentiels d’une idée aux allures « électoralistes », d’autant plus qu’il reprend la logique de mes précédents propos sur la nécessité de sortir du discours « calinours » et de penser la révolution citoyenne à partir d’une vaste mobilisation populaire.

Première objection

« Dans de telles circonstances où la population seraient mobilisée et radicalisée (ce qui est absolument nécessaire pour la réussite d'une telle entreprise), à quoi bon proposer une sortie de crise mitoyenne ? »

Si cette hypothèse sur le contexte socio-politique sous-jacent à l’élection d’un gouvernement solidaire est bien fondée, ne rend-elle pas caduque l’idée d’offrir une alternative provincialiste à la population par référendum, la majorité étant d’emblée convaincue par la nécessité de l’indépendance ? Cette dernière prémisse est fausse, car il est tout à fait probable qu’un gouvernement de gauche soit élu avec seulement 30% ou 40% des voix, sans compter la possibilité théorique d’un gouvernement souverainiste mixte (PQ+QS) qui initierait une démarche constituante sans qu’il y ait nécessairement une majorité populaire radicalisée. Dans tous les cas, il faut envisager que si le peuple sera en partie convaincu par le projet d’indépendance et de transformation sociale avant l’élection, le processus de radicalisation se poursuivra et sera amplifié par la double rupture initiée simultanément par le gouvernement solidaire (sur le plan socio-économiques) et l’assemblée constituante (sur le plan constitutionnel). D’ailleurs, l’un des objectifs du processus constituant est justement de forger une volonté collective qui n’est pas donnée d’emblée, en accélérant le processus historique en cours par l’élaboration démocratique d’une conscience nationale et sociale.

Par ailleurs, il ne s’agit pas de proposer une sortie de crise « mitoyenne », mais de mettre en évidence l’alternative politico-constitutionnelle qui devra être tranchée par la population lors du référendum. Que le résultat ultime soit un Non (dans le cas du rejet d’une constitution indépendantiste) ou un Oui (pour une constitution provinciale), la stratégie d’accession à la souveraineté aura échoué. Dans un cas comme dans l’autre, il n’y a pas de garantie. Mais nous devons nous demander tout de même quelle est la stratégie qui permettra de réduire la probabilité d’une défaite.

Deuxième objection

 « À quoi sert donc cette seconde option de «constitution provinciale» sinon à transformer la constituante en une espèce de stratégie étapiste qui vise à rallier les fédéralistes et modérés, leur laissant un nouvel espace pour s’organiser et préparer une contre-attaque ? »

Tout d’abord, il ne s’agit pas d’une stratégie étapiste comme le préconisent certains souverainistes dans la lignée du Parti québécois, qui souhaitent d’abord rédiger une constitution provinciale adoptée par l’Assemblée nationale, faire un référendum sur l’indépendance, puis lancer une assemblée constituante après la victoire du Oui. L’étapisme suppose plusieurs étapes, alors que la stratégie proposée implique un seul mouvement, qui permettra de trancher une fois pour toute la question nationale. Dans le cas des deux derniers référendums, la question restait ouverte car le Québec n’a jamais signé la constitution canadienne, et n’avait pas choisi positivement son statut politique, votant plutôt pour le statu quo. Ce n’était que partie remise, et il en serait de même si l’assemblée constituante devait exclusivement rédiger la constitution d’un Québec indépendant et si le peuple rejetait l’indépendance une troisième fois. Dans l’éventualité où le peuple québécois adopterait la constitution provinciale, il signerait définitivement sa dépendance nationale en entrant dans la constitution canadienne, referment ainsi la brèche historique de la souveraineté. Nous pouvons dire que le troisième référendum sera le dernier, et c’est pour cette raison qu’il ne faut pas manquer notre coup.

Il est donc crucial de ne pas donner à nos adversaires « un nouvel espace pour sévir », une arme supplémentaire sur un plateau d'argent. Le fait de proposer à l’assemblée citoyenne tirée au sort de rédiger deux projets de constitution permettrait-il à ceux-ci de contre-attaquer ? Nous supposons à l’inverse que le fait de restreindre le mandat de l’assemblée constituante à la seule option indépendantiste donnera des armes aux fédéralistes qui rétorqueront que la gauche indépendantiste aura confisqué la souveraineté populaire à son avantage. Ils attaqueront non seulement le projet indépendantiste, mais la légitimité même du processus constituant. Cela augmenterait la méfiance d’une partie non négligeable de la population à l’égard de la démarche ; l’attention publique sera rivée sur le caractère acceptable ou non de l’assemblée citoyenne, et non sur l’objectif du processus constituant, à savoir la résolution de la question nationale par l’élaboration démocratique du projet de pays.

C’est pourquoi il faut s’assurer que l’assemblée constituante repose sur un large consensus national, avant et pendant le processus de délibération. Cela implique de montrer qu’elle peut inclure tous les points de vue, en montrant les avantages et inconvénients respectifs de chaque option, tout en permettant au peuple de décider, lors du référendum, du type d’État quelle veut se donner. Cette stratégie, apparemment réformiste et modérée, est néanmoins beaucoup plus radicale si on regarde les conséquences pratiques initiée par une comparaison systématique de deux projets constitutionnels. En effet, l’alternative ne sera plus entre l’indépendance et le statu quo, entre une rupture risquée et le confort de l’ordre existant, mais entre un projet de pays et un projet de province (!), entre une République libre et une constitution limitée. La deuxième option risque-t-elle de mobiliser largement, de soulever l’enthousiasme populaire, au même titre qu’une constitution qui aura les coudées franches pour exprimer les valeurs, institutions et aspirations collectives du peuple ? Cela mettrait-il en évidence la différence fondamentale entre une ancienne constitution (rendue explicite) qui favorise les classes dominantes, et une constitution qui pourra inclure des droits sociaux inédits, un nouveau partage du pouvoir politique, et d’autres innovations qui ne sont pas possibles à l’intérieur du carcan canadien ? Le contraste serait saisissant !

Par ailleurs, les fédéralistes ne pourraient plus miser exclusivement sur la peur de la souveraineté et l’attachement à l’identité canadienne, car ils devraient promouvoir positivement leur constitution à demi-teinte, le monarchisme constitutionnel, quelques principes formels qui ne seraient que l’expression juridique de l’ordre existant, et non le projet politique d’une nouvelle société. Ils apparaitront ainsi clairement comme les conservateurs, les défenseurs d’un modèle social qui limite substantiellement la démocratie et la liberté populaire. Même si les fédéralistes auront la chance de participer aux consultations publiques pour influencer la forme de la constitution provinciale, celle-ci ne pourra jamais être aussi emballante que le projet républicain. Enfin, les fédéralistes auront non seulement à répudier l’idée de souveraineté, mais à critiquer la forme démocratique d’un nouvel État qui demande à naître. Ils ne pourront pas non plus attaquer, bouder ou boycotter le processus constituant, car ils y participeront directement.

Autrement dit, au lieu de rejeter les fédéralistes de l’assemblée constituante en leur donnant l’occasion de critiquer le projet de pays et le processus qui permet de l’élaborer, ils seront pris dans le filet de la souveraineté populaire et n’auront pas le choix de combattre le projet de République libre du Québec. Ils seraient alors considérés comme des anti-républicains, les défenseurs des élites économiques et politiques, et non comme les porteurs d’un projet positif et libérateur. La stratégie de la double constitution permet ainsi de forcer les non-souverainistes à entrer dans le jeu du processus constituant, ceux-ci ne pouvant plus le critiquer de l’extérieur ; ils seront obligés de se soumettre aux règles du jeu, et de jouer le rôle inconfortable de promoteur d’une option moins attrayante. Les classes dominantes, qui « ont d’ailleurs partout tenter de déstabiliser le processus constituant tout en décrédibilisant ses travaux », seraient forcées de promouvoir un « projet de province », une constitution bornée.

Troisième objection

« Le processus constituant – s’il vise (et seulement à cette condition) à dessiner les contours d’un Québec libre et transformé - ouvrira un nouvel espace où le reste de la population potentiellement « convaincable » pourra s’inscrire et être mobilisée, alors que les forces réactionnaires n’auront d’autre choix que de s’exclure du processus sous peine de le légitimer. Permettre aux forces de la réaction de s’inscrire dans la constituante ne ferait qu’arracher ce symbole du renouveau démocratique des mains de la population en lutte pour en faire un outil neutre et institutionnel. Ouvrir la voie à une alternative (constitution québécoise), c’est laisser croire que celle-ci est possible, ce qui est faux. »

Avec la rédaction de deux projets constitutionnels qui seront comparés systématiquement, toute la population sera mobilisée à peser les mérites et inconvénients de chaque option, l’alternative indépendantiste et républicaine ayant sans doute très peu de désavantages. Les « forces réactionnaires » ne seraient pas exclues du processus constituant pour le délégitimer, mais n’auraient pas d’autre choix que de l’appuyer. Le fait de les inclure les poussera à rédiger la constitution provinciale la plus conservatrice possible, réduisant d’autant plus son attractivité. Si nous pouvons anticiper qu’une minorité de nationalistes conservateurs tenteront d’influencer la constitution indépendantiste, la majorité des « forces progressistes » tentera d’élaborer la structure politique et institutionnelle la plus libre qui soit, en forgeant un projet de pays aux contours démocratiques et populaires.

Autrement dit, le processus constituant aura le mérite de faire converger dans un nouveau contexte historique les forces souverainistes et progressistes qui étaient opposées aux forces libérales et fédéralistes durant la Révolution tranquille. Tant les classes paysannes et ouvrières canadiennes-françaises que la petite bourgeoisie francophone montante s’opposaient « objectivement » à la grande bourgeoise commerciale anglophone à cette époque. D’où l’appel initial de l’indépendantisme comme lutte de libération sociale et nationale dans les années 1960 et 1970, qui pourra revenir sous un nouveau jour par la construction d’une unité populaire forgée avant et pendant le processus constituant.

Ensuite, ouvrir la voie à l’option provincialiste n’est pas trompeur, car une constitution provinciale est juridiquement et techniquement possible, comme le montre l’exemple de la Colombie-Britannique. S’il ne s’agit pas d’une « alternative politique » au sens fort du terme, c’est parce que nous sommes déjà une province, la constitution provinciale ne faisant qu’expliciter l’ordre existant. Est-il pire d’adopter une telle constitution que rien du tout ? En tant qu’indépendantiste, cela fait peu de différence. Mais le fait de rendre visible notre situation de dépendance nationale et la domination de l’État canadien rendra d’autant plus probable l’émergence d’une volonté collective visant l’auto-institution de la société. L’assemblée constituante ne représente donc pas un « outil neutre et institutionnel », mais le véhicule démocratique d’une population en lutte.

Quatrième objection

« Je soupçonne plutôt cette nouvelle «stratégie» (que n'aurait pas renié Lévesque et Morin) de servir uniquement à éviter l'éclatement peut-être inévitable du parti. C’est évidemment le clivage Option citoyenne-UFP qui remonte à la surface. Cette contradiction doit être mise de côté si ce parti veut être en bonne posture pour participer à la mobilisation lors des crises sociales qui, on l’espère, se profilent à l’horizon et prendre le pouvoir. C’est ce que Podemos a démontré en Espagne comme vous l’avez vous-même souligner: ce parti a connu une croissance rapide et a rattrapper Izquerdia Unida car il a su non-seulement parler de, mais incarner une rupture avec l’ordre établi. Je vois mal comment QS dont même la proposition la plus intéressante (la constituante) est affectée dans sa forme par ses tiraillements, hésitations et oui génuflexions pourrait incarner ce genre de volonté de rupture. »

La nouvelle proposition stratégique d’une double constitution peut certes apparaître comme une tactique visant à concilier un antagonisme fondamental au sein du parti, surtout si on insiste sur le « débat déchirant » que j’ai mentionné dans mon précédent article. Mais il n’en est rien, car cette proposition ne cherche pas à trouver un terrain neutre, une entente mitoyenne faute de mieux, mais à dépasser l’impasse actuelle par une stratégie radicale qui n’avait pas encore été soulevée. De plus, le débat sur la précision du mandat de l’assemblée constituante était transversal et ne correspondait pas à l’ancien clivage « Option citoyenne-UFP », des membres issus des deux tendances, des radicaux et des modérés soutenant diverses positions sur le mandat « ouvert » ou « précisé » pour différentes raisons.

Je suis parfaitement d’accord avec le fait que la tension sur la question nationale doit être surmontée pour que Québec solidaire assume une posture de rupture afin de prendre le pouvoir. Si le parti a été tiraillé dans son interprétation du rôle de la constituante, c’est parce que celle-ci est demeurée vague et que sa fonction stratégique n’a pas été pensée jusqu’au bout. Comment savoir à quoi un tel bidule devrait aboutir, si l’assemblée doit rédiger une ou des propositions concernant les valeurs, le statut politique, les institutions, sans présumer l’issue des débats ?

À mon sens, le fait de préciser que la constituante devra rédiger deux projets de constitution permettra à la fois de clarifier la posture de Québec solidaire à l’endroit de la population, et d’éclairer la conscience stratégique du parti sur l’importance de la question nationale. D’une part, celui-ci pourra affirmer sans « génuflexions » que le but de l’assemblée constituante est de rédiger démocratiquement un projet de pays, et de montrer au grand jour à la population les avantages d’une République libre, démocratique et écologique, comparativement à celle d’une constitution provinciale. La posture indépendantiste sera ainsi affirmée, en ancrant l’objectif de la souveraineté nationale sur un processus de souveraineté populaire légitime, mobilisateur et inclusif.

Le parti pourra ensuite répliquer aux détracteurs – qui affirment que le processus constituant sera noyauté par les souverainistes en excluant la majorité de la population – en disant que les fédéralistes seront invités à participer et à faire valoir leur option de manière transparente, par une large délibération démocratique qui permet de limiter le pouvoir de l’argent et de la corruption. On veut éviter les dérapages du dernier référendum et le dialogue de sourds par une nouvelle stratégie qui pourra mettre en évidence les différences entre deux projets, ceux-ci n’étant pas élaborés par le parti au pouvoir ou le gouvernement canadien, mais par le peuple lui-même, rassemblée dans de vastes assemblées populaires et une assemblée citoyenne tirée au sort. Il n’y a pas de contradiction à montrer que le but de la démarche constituante est de faire un pays, et de laisser une place aux provincialistes pour rédiger une constitution qui devra réussir à convaincre une majorité populaire pour être adoptée.

Québec solidaire aura ainsi une stratégie « blindée », acceptable à la fois par les souverainistes et les fédéralistes, même si elle favorise dans les faits la perspective indépendantiste, non par la ruse ou une stratégie cachée, mais parce qu’elle pourra montrer le mérite intrinsèque du projet de pays, d’une République libre et démocratique. Le parti pourra développer son hégémonie politique sur la question nationale, tout en ouvrant une brèche historique, une rupture avec le régime constitutionnel canadien. Une fois que le processus constituant sera mis en place, rien ne pourra arrêter les délibérations relativement « sereines » de l’assemblée citoyenne, les débats virulents dans la société civile, le déchaînement des forces révolutionnaires et réactionnaires dans l’espace public. Québec solidaire aura alors réussi à canaliser la lutte pour l’émancipation nationale par une main de fer dans un gant de velours.

vendredi 27 juin 2014

L’hypothèse du double mandat comme radicalisation de l’Assemblée constituante


Un débat alambiqué

Le débat stratégique sur la question nationale au sein de Québec solidaire bat son plein. Pour récapituler les enjeux, la Commission thématique stratégie pour la souveraineté a proposé depuis un certain moment une demande de révision de programme afin de préciser que le mandat de l’assemblée constituante serait de rédiger la constitution d’un Québec indépendant. Cette suggestion visait à éviter l’éventualité où le processus constituant déboucherait uniquement sur une constitution provinciale, enlevant par le fait même la capacité au peuple québécois d’exercer son droit à l’auto-détermination lors du référendum. L’important, c’est que la population puisse se prononcer minimalement pour ou contre l’indépendance à la fin du processus constituant, car la détermination du statut politique du Québec ne doit pas reposer sur une minorité élue, qu’il s’agisse de l’Assemblée nationale ou constituante. C’est le principe de souveraineté populaire, qui renvoie à la fois à l’indépendance nationale, à l’auto-gouvernement du peuple et à l’exercice démocratique menant à ce double objectif.

Or, cette proposition avait suscité diverses réactions au sein du parti, dont la principale peut être résumée comme suit : le fait de restreindre l’assemblée constituante à la rédaction d’une constitution indépendantiste aura pour conséquence de susciter l’aversion des fédéralistes et indécis, faisant ainsi perdre le caractère inclusif et la légitimité du processus constituant. L’assemblée sera noyautée par des souverainistes convaincus, et les adversaires n’auraient qu’à attendre le référendum pour bloquer le projet. On reproduirait ainsi la même erreur de la stratégie référendaire du mouvement souverainiste classique. La deuxième stratégie consiste alors à garder la position actuelle et ouverte de l’assemblée constituante, qui n’a pas soulevé de problèmes importants jusqu’à maintenant.

Ce débat polarisant entre la version ouverte ou précisée du mandat pourrait même déboucher sur un résultat déchirant lors du prochain Conseil national. Soit la première option gagne, Québec solidaire se radicalise sur le plan souverainiste et ouvre ainsi certaines alliances possibles avec Option nationale (voire le Parti québécois si celui-ci s’engage dans un processus référendaire). Mais il perdrait alors sa spécificité stratégique et inclusive qui lui permettait de se démarquer des autres partis souverainistes. Soit la deuxième option l’emporte, le parti demeure ouvert aux personnes non convaincues par le projet indépendantiste, mais reste prisonnier d’un double discours qui affirme d’une part les mérites du pays, et d’autre part la possibilité de plaire au plus grand nombre. Cette deuxième solution maintiendrait le statu quo, confirmant ainsi les soupçons d’un souverainisme mal assumé ou complexé qui déplait tant aux indépendantistes qu’aux fédéralistes méfiants. Cette stratégie mitoyenne n’est pas gagnante, ni dans la rue, ni électoralement parlant.

L’hypothèse de la double constitution

Comment sortir de cette impasse, où Québec solidaire doit rassembler une majorité populaire alors que la question nationale divise, tout en assumant pleinement la double nécessité du projet de pays et de transformation sociale qui sont inextricablement liés ? Comment créer un consensus au sein du parti, qui ne soit pas un simple compromis ou un juste milieu anodin visant à masquer des divergences fondamentales ? Dans son dernier texte « Pour un référendum avec deux OUI », Benoit Renaud suggère une piste fort intéressante :

« Il convient donc que l’Assemblée nationale donne à l’assemblée constituante un mandat à la fois clair et inclusif. Cette dernière devrait élaborer deux projets de constitution : une nationale, l’autre provinciale. Une bonne partie du texte pourrait être identique dans les deux versions. Dans les débats de l’assemblée et les consultations populaires qu’elle conduira, les fédéralistes auront l’occasion d’influence le projet des indépendantistes et vice versa.

Cette formule permettrait des débats sereins et constructifs à l’étape de la Constituante, ce qui préparerait le terrain pour une campagne référendaire respectueuse et éclairante. Le résultat du référendum ne pourrait alors qu’être positif pour le Québec. Pour les indépendantistes, le pire scénario serait l’adoption d’une constitution provinciale incluant une bonne partie des principes qui leur tiennent à cœur, et ce, à la suite d’une démarche infiniment plus démocratique que celle ayant présidé à l’adoption de la constitution canadienne. Ce serait un point de départ solide pour exiger le transfert vers le Québec de nouveaux pouvoirs et un fédéralisme asymétrique.

Pour les fédéralistes, le pire résultat serait que le Québec décide de faire son indépendance tout en garantissant un certain nombre de droits dans sa loi fondamentale et en faisant du Québec un pays qualitativement plus démocratique que le Dominion du Canada. Nous pouvons parier que dans un débat participatif et inclusif de toutes les composantes de la nation, les institutions de la communauté anglophone seraient respectées, de même que les droits des minorités. »[1]

Cette solution apparemment « gagnante-gagnante » est sans doute la plus simple et élégante pour établir un large appui populaire autour du processus constituant. Or, il faut souligner les failles potentielles de cette approche afin de mieux comparer les bienfaits et désavantages d'une double question (ou même triple question, car il faudrait laisser le choix au peuple québécois de refuser les deux constitutions s'il n'en veut pas tout simplement). Un ensemble de questions surgissent alors : le peuple québécois, s'il doit choisir entre deux options de constitution, votera-t-il positivement pour la constitution elle-même, ou simplement pour ou contre l'indépendance, l'option du Oui et Non étant seulement enveloppée dans un emballage constitutionnel?

Ensuite, est-ce que le fait de rédiger deux constitutions mènerait la population à moins se soucier du résultat final, chacun ayant le choix entre une rupture potentiellement risquée (souveraineté) et un prix de consolation (une belle constitution qui scellerait notre dépendance nationale) ? Est-ce que le but de la constituante est de former un projet de pays, ou un double projet constitutionnel qui laisse aux citoyens-consommateurs la possibilité de sélectionner l'option qui correspond le mieux à leurs préférences personnelles ? Est-ce que l’assemblée constituante souffrirait d’un « trouble dissociatif », celle-ci devant consulter systématiquement la population pour les deux projets?

L’analogie de l’autoconstruction

La réponse la plus simple à donner à ces différentes objections est qu’un double projet de constitution permettra de rendre saillantes les différences fondamentales entre deux options politiques, et donc de présenter une alternative qui ne repose pas sur un Oui ou un Non indéterminé. Aucune des deux options ne représente un chèque en blanc donné aux gouvernants, mais chacune exprime un projet politique élaboré démocratiquement par le peuple, qui pourra prendre un choix éclairé quant à son avenir politique. Choisira-t-il le risque ou la sécurité, l’aventure de la liberté ou le confort du monde familier ? Cette question n’est pas spécifique à la stratégie du double mandat de l’assemblée constituante, elle ne découle pas de la présence de deux constitutions, mais renvoie à toute question fondamentale qui relève d'un choix sur des trajectoires socio-politiques, de la décision qui permet de trancher une incertitude et d’avancer.

Le but de l’assemblée constituante est de rendre visible la divergence entre deux chemins collectifs, et permettre au peuple québécois de faire le saut nécessaire à ce point de bifurcation de son histoire. Il s’agit de lui donner le courage de son avenir, de lui apprendre à s’autodéterminer, et donc de choisir l’indépendance. Comme le peuple donnera au pays  une forme concrète qu'il aura forgé à son image, il aura forcément le goût de séjourner dans sa nouvelle demeure. Pour prendre l’exemple d’une pratique sociale émergente, l’assemblée constituante repose sur le principe de l’autoconstruction, qui désigne le fait pour un individu ou un groupe de réaliser une construction (maison, voilier, éolienne, chauffe-eau solaire, etc.) avec l’aide réduit de professionnels. Cette méthode alternative implique un travail collaboratif qui permet de développer les capacités de chacun, tout en produisant une œuvre écologique, personnalisée et conviviale. Ce principe repose sur des motivations variées, les gens construisant « des maisons individuelles ou partagées pour toute sorte de raisons, dont :

- créer un logement à moindre coût ;
- créer un environnement adapté aux souhaits et besoins particuliers de l'individu et de sa famille, élaborer un style architectural et de vie plus personnel ;
- vivre dans une maison qu'on ne serait pas en mesure de s'offrir sur le marché « libre » ;
- éthiques centrées sur la recherche d’autonomie, une volonté de sortir du système marchand. Souvent, l'autoconstructeur est également habité par une démarche de réappropriation de techniques et de savoir-faire simples : en ce cas, les principes de construction et de fonctionnement de l'habitat font appel à des techniques simples et pratiques, réalisables et réparables par l'habitant ;
- éthiques, centrées sur l’écologie, le respect de la nature et le souhait de recycler et réutiliser des matériaux, etc. Avec une approche de type haute qualité environnementale, les options architecturales et techniques retenues peuvent être très poussées et innovantes, faisant appel à des technologies de pointe. »[2]

Le schéma populiste

Pour ajouter une nouvelle dimension à cette stratégie, nous ferons ici l’hypothèse d’une dynamique sociale qui pourrait émerger du processus constituant. Celle-ci viendrait radicaliser le débat démocratique, malgré l'apparence initiale de consensus et de discussion  sereine. Il s’agit de replacer le débat sur une logique jusqu’ici ignorée, en présentant l’assemblée constituante comme un grand rassemblement du 99% contre le 1%, et non comme une lutte statique entre fédéralistes et souverainistes. Le débat opposerait alors la démocratie à l’oligarchie, le processus d’autodétermination au bloc au pouvoir. Ce « schéma populiste » vise à former une majorité populaire contre l’élite politique et économique en minimisant l’antagonisme souverainisme/fédéralisme pour forger un consensus national autour de l’assemblée constituante comme sortie de la crise sociale.

Par ailleurs, le fait de pouvoir rédiger un projet de constitution original pour un État indépendant permettrait au camp souverainiste de constituer un front républicain ou populaire, celui-ci militant non seulement contre l’État fédéral, mais pour la création d’une République libre et démocratique. Les fédéralistes pourraient alors être associés aux adeptes du monarchisme constitutionnel et du parlementarisme britannique, du gouvernement des juges, de la corruption, etc. Ce recadrage idéologique serait provoqué par le fait qu’on ne parlerait plus seulement du rapport entre deux États (fédéral et provincial), mais de la remise en question des institutions politiques à tous les niveaux, tant au Parlement canadien qu’à l’Assemblée nationale du Québec. Le vieux débat entre souverainistes et fédéralistes serait alors transformé, opposant maintenant ceux et celles qui militent pour la République du Québec, puis le front conservateur qui souhaite préserver une structure étatique archaïque, le statu quo, un système politique centralisé auquel plus personne ne croit de toute façon.

On aurait deux options lors du référendum : démocratie réelle, ou pseudo-démocratie. La puissance intellectuelle et morale d’une telle stratégie permettrait de consolider une véritable hégémonie pour le projet de pays, qui serait alors articulé dans une chaîne d’équivalences, c’est-à-dire un réseau de significations associées qui permettent de cristalliser une vision du monde et une volonté collective : souveraineté populaire = démocratie véritable = processus constituant = indépendance = République du Québec. Le fait de recadrer la question nationale sur la démocratie radicale constitue le cœur de la stratégie de la révolution citoyenne, qui ancre le drapeau sur le carré rouge en offrant au rêve du printemps québécois sa pleine puissance institutionnelle. Elle fait reposer l’indépendance nationale sur l’autogouvernement populaire, la décentralisation, le pouvoir citoyen qui vise à renverser l’oligarchie, les banquiers, la classe politique corrompue, l’État pétrolier, les institutions héritées du colonialisme, etc.

Un autre avantage de cette approche est que l’assemblée constituante est actuellement la position dominante du mouvement souverainiste en reconfiguration, comme l’atteste le Conseil de la souveraineté qui mise sur la souveraineté populaire et la démarche constituante. La récente montée de l’idéologie républicaine chez les intellectuels souverainistes, malgré le fait qu’elle reste en partie enfermée dans le schème du nationalisme classique, serait très probablement partie prenante de la stratégie du double mandat, car elle pourrait alors faire valoir son discours contre le camp fédéraliste et anti-républicain. Or, ce serait ici la gauche radicale, partisane de la démocratie, l’égalité, le pouvoir citoyen, l’autogouvernement populaire, la critique des inégalités sociales et des élites économiques, qui serait en position hégémonique sur la question nationale. Il s’agit donc de construire un nationalisme authentiquement populaire et émancipateur, en rupture avec le nationalisme bourgeois et politically correct qui est aujourd’hui vieilli et discrédité par la majorité.

Et un tirage au sort avec ça ?

Un autre moyen de renforcer le caractère « populaire » de la démarche constituante est de remplacer le suffrage universel cher à la démocratie représentative par un tirage au sort. Cette idée proposée par Roméo Bouchard dans son livre « Constituer le Québec » est tout à fait pertinente pour la stratégie indépendantiste, tant du point de vue de la légitimité que de l’efficacité. Le sociologue et politiste français Yves Sintomer, que j’ai eu la chance de rencontrer à Paris, aborda largement cette question dans son livre Le pouvoir au peuple. Jurys citoyens, tirage au sort et démocratie participative (2007). Le tirage au sort est trop souvent ignoré par la gauche et les adeptes de la démocratie radicale, alors qu’il représentait une composante cruciale de la démocratie athénienne qui structurait la vie politique aux côtés des principes de délibération, de participation et de représentation.

Par ailleurs, il faut rappeler avec Jacques Rancière que la démocratie est fondée sur l’égalité des compétences, le postulat d’une égalité des intelligences, c’est-à-dire le « gouvernement de n’importe qui ». Cela ne veut pas dire que tout le monde est également intelligent en tout point, mais que chacun et chacune possède la capacité de réfléchir, de délibérer, de critiquer, de proposer des idées et de participer de manière significative aux décisions collectives qui affectent sa vie, en tant qu’individu ou membre de la communauté politique. Une fois que nous reconnaissons ce principe démocratique qui fonde l’idéal de la souveraineté populaire et le conditionne, nous pouvons sans problème accepter que les membres de l’assemblée constituante qui seront chargés de rédiger la future constitution du Québec soient tirés au sort, à la manière de l’assemblée citoyenne sur la réforme du mode de scrutin de la Colombie-Britannique, formée en 2004. « Il s’agissait d’une assemblée indépendante et non partisane composée de citoyens qui se sont réunis afin d’examiner le système électoral de la province. L’Assemblée comptait 160 membres, soit 80 femmes et autant d’hommes. Deux d’entre eux étaient des Autochtones, tandis que les autres représentaient chacune des 79 circonscriptions électorales de la Colombie-Britannique. Ces membres ont été choisis au hasard sur une liste de noms reflétant la composition de la population de la Colombie Britannique sur les plans du sexe, de l’âge et de la répartition géographique. »[3]

Si nous tenons compte que Québec solidaire souhaite que l’assemblée constituante jouisse d’une bonne représentativité, afin d’inclure les minorités culturelles et des personnes issues de différents milieux socio-économiques, il serait incohérent de miser sur le suffrage universel qui favorise les personnes éduquées, riches et privilégiées qui jouissent d’importants réseaux de contacts. Une démarche constituante qui se base sur la souveraineté populaire et la démocratie participative ne peut pas être fondée sur le principe structurant du gouvernement représentatif qui sélectionne une aristocratie élective par un concours de popularité. L’autonomie de l’assemblée constituante à l’égard des politiciens recyclés, carriéristes et militants des partis politiques serait également garantie par une méthode de sélection aléatoire.

De plus, cette stratégie parvient à combiner différentes formes de légitimité démocratique et de types de citoyens : le « citoyen ordinaire » par le tirage au sort, le « citoyen mobilisé » par le processus de consultation qui aura lieu partout au Québec, puis la totalité des citoyens lors du référendum. Nous avons alors une combinaison de démocratie délibérative, participative et directe dans un même processus constituant, qui inclut les avantages de chaque modalité en donnant une puissance maximale à ce dispositif.

L’ajout d’une proposition de révision du programme en faveur d’une assemblée citoyenne tirée au sort permettrait de « pimper » la stratégie constituante, de lui donner davantage de crédibilité populaire, de donner le goût du pays en montrant que n’importe qui peut participer directement à son élaboration. Pour répondre à l’objection classique que le tirage au sort ne peut pas garantir la compétence des personnes sélectionnées aléatoirement concernant les questions techniques et juridiques relatives à la rédaction d’une constitution, il faut préciser un élément important du débat entre savoirs professionnels et profanes, experts et savoirs citoyens. Tout comme l’assemblée tirée au sort de la Colombie-Britannique, les membres de l’assemblée constituante du Québec seront accompagnés d’experts pour les informer correctement et veiller aux révisions légales sur des sujets complexes, comme le font les avocats et juristes à l’Assemblée nationale. Mais ce sont les membres constituants, par l’interaction constante avec les assemblées régionales et les processus de délibération qui auront cours dans la société civile, qui auront l’autorité de décider des orientations des projets de constitution. De plus, comme le citoyen ordinaire est choisi pour seulement un mandat et n'a pas forcément d'intérêts à défendre, il sera peut-être même plus compétent et impartial qu’un membre de la classe politique mû par ses intérêts particuliers et sa volonté de gouverner.

En précisant sa démarche constituante et en la rendant plus lisible à la population, Québec solidaire pourra augmenter sa crédibilité et faire des gains importants, en forgeant un sujet politique apte à gouverner, qui ne doit pas être le parti mais le peuple lui-même dans son processus d’émancipation sociale et nationale. L’assemblée constituante n’est pas l’instrument d’un parti pour prendre le pouvoir, mais un jury citoyen à grande échelle qui permettra au peuple de se donner de nouvelles institutions et de développer sa capacité à s’auto-gouverner. Comme le dit Alexis de Tocqueville, « ainsi le jury, qui est le moyen le plus énergique de faire régner le peuple, est aussi le moyen le plus efficace de lui apprendre à régner ».

mardi 24 juin 2014

Des nouvelles interfaces politiques


Partie III : La troisième vague et le « non-parti » du M5S

En faisant une typologie des partis de gauche de 1960 à nos jours, nous pouvons les classer schématiquement en trois moments historiques. La première vague, qui a connu son moment fort de 1960 à 1980, rassemble la gauche social-démocrate, socialiste et communiste. Avec l’effondrement du communisme d’État, la montée du néolibéralisme et la dérive de la social-démocratie vers le social-libéralisme, une deuxième vague apparue à l’aube des années 2000. Une gauche radicale et altermondialiste prit le relais par la création de nouveaux partis-coalitions, qui visaient à reconstruire les éléments démembrés de la gauche classique par la crise des années 1980-1990. Québec solidaire, les différents partis de la gauche européenne (Syriza, Die Linke, Front de gauche), ainsi que la gauche latino-américaine qui a pris le pouvoir au Venezuela, en Bolivie, et en Équateur dans les années 2000 (Chavez, Morales, Correa) participent de ce même mouvement politique à l’échelle internationale.

Par ailleurs, une troisième vague de la gauche émerge depuis le début des années 2010, qui se caractérise par d’apparition de mouvements de contestation populaires (printemps arabe, Indignados, Occupy Wall Street, printemps québécois, insurrections à Istanbul, au Brésil, etc.) et  de nouvelles formes d’organisation « post-partisanes » difficiles à cerner par les schémas traditionnels. La stratégie essentielle de ce nouveau type de parti politique consiste paradoxalement à ne pas être un parti. Ceci s’explique notamment par la crise endémique du parlementarisme qui n’a pas réussi à surmonter la crise mondiale de 2007, les partis de centre-gauche comme ceux de centre-droite continuant d’appliquer les mêmes politiques néolibérales et des plans d’austérité, ce qui contribue à la montée des extrêmes et du populisme, à la dénonciation de la finance mondiale, à la crise de l’Europe, etc. Si ce contexte de crise sociale favorise la poussée de l’extrême-droite à titre d’alternative (supposée) au système, elle contribue également à l’émergence de « populismes potentiellement progressistes » qu’il faut regarder de plus près.

Le premier exemple est le « Mouvement 5 étoiles » (Movimento 5 Stelle ou M5S en italien) créé le 4 octobre 2009 à partir du blog de l’humoriste Beppe Grillo. Ce mouvement politique italien, qui se qualifie d’« association libre de citoyens », a d’abord participé aux élections municipales et régionales en faisant élire quelques conseillers, puis a obtenu plus de 23,5% au Sénat et 25,5% à la Chambre des députés aux élections nationales de 2013, gagnant pas moins que 163 parlementaires à leur première expérience électorale !

Le M5S, qui se désigne comme un « non-parti », prône la participation directe des citoyen.nes dans la gestion des affaires publiques à travers des formes de cyberdémocratie, et utilise abondamment les réseaux sociaux comme moyen d’information. Il vise non seulement à changer radicalement la société, mais la façon même de faire de la politique ; ils considèrent que les gens ne devraient plus déléguer leur pouvoir aux partis, qui sont devenus des intermédiaires archaïques et corrompus entre les citoyen.nes et l’État, servant les intérêts des lobbies et du pouvoir financier. Les candidat.es aux élections européennes furent sélectionnés par un vote en ligne, et aucune personne ne peut obtenir plus de deux mandats à n’importe quel échelon (local, régional, national ou européen) car la politique est considérée comme étant un « service temporaire ». Le M5S propose également un « zero-cost politics » par l’auto-réduction des salaires des élu.es et le rejet du remboursement public des dépenses électorales, en privilégiant le socio-financement (crowdfunding) et en redonnant les montants excédentaires à un fonds de micro-crédit pour le développement des petites et moyennes entreprises.

Sur le plan idéologique, les cinq étoiles du logo symbolisent l’eau publique, les transports durables, le développement durable, la connectivité et l’environnement. Le V majuscule représente à la fois le « V » de victoire et le mot vaffanculo qui signifie « va te faire foutre ». Cette dernière expression fut attachée au V-Day, une initiative populaire lancée par Beppe Grillo qui visait à dénoncer la corruption du gouvernement à travers la campagne parlamento pulito (parlement propre). En fait, ce « non-parti » opère un curieux mélange idéologique qui dépasse à certains égards le clivage gauche/droite : populisme, cyberdémocratie, écologie politique, décroissance, anti-corruption, antipartisme, altermondialisme, anticapitalisme, euroscepticisme. D’un point de vue économique, il préconise la création d’emplois verts, le développement d’énergies propres, et s’oppose à des projets coûteux et polluants comme les incinérateurs qui nuisent à la qualité de vie. Il touche également des thèmes de la droite comme la réduction de la dette publique à travers de fortes coupures dans les dépenses de l’État, notamment par l’usage de nouvelles technologies pour éliminer les intermédiaires entre les citoyen.nes et les services publics. Le M5S propose des politiques progressistes comme le revenu de citoyenneté, s’oppose à toute règlementation d’Internet, à l’énergie nucléaire et aux projets de TGV, mais fait (curieusement) partie du groupe parlementaire « Europe libertés démocratie », qui rassemble une partie de la droite nationaliste, identitaire, populiste et eurosceptique (qui inclut entre autres le fameux parti britannique UKIP).

Vers une nouvelle gauche populaire: l’exemple de Podemos

Si le Mouvement 5 étoiles rejette explicitement le clivage gauche/droite, peut-il être situé tout de même à gauche de l’échiquier politique ? Malgré certaines positions ambiguës et une idéologie hybride qui se laisse difficilement catégoriser, il semble que sa base électorale soit principalement au centre-gauche[1]. Par ailleurs, son projet écologiste qui vise une démocratisation radicale des institutions politiques s’oppose à l’étatisme et à la construction européenne parce qu’ils ont tendance à centraliser le pouvoir et à vider de sa substance la souveraineté populaire. Le populisme du M5S est donc beaucoup plus progressiste que le populisme d’extrême droite, qui ne remet aucunement en question le capitalisme et le productivisme destructeur de l’environnement, en proposant généralement des politiques conservatrices et réactionnaires. Mais le mouvement de Beppe Grillo n’est pas forcément en synergie avec l’héritage de la gauche historique et les mouvements sociaux, de sorte qu’il représente davantage un populisme à saveur progressiste qu’une véritable « gauche populaire », c’est-à-dire un mouvement qui aurait adapté son projet de transformation sociale dans le moule d’un discours à la fois populiste et émancipateur.

Le meilleur exemple de cette nouvelle gauche populaire est sans doute le mouvement Podemos, cofondé par son porte-parole charismatique, Pablo Iglesias, qui « incarne à lui seul certaines des mutations de la gauche espagnole. Ce professeur de sciences politiques, né en 1978 à Vallecas, dans la banlieue sud de Madrid, a fondé début 2014 Podemos (« nous pouvons »), un collectif né dans le sillage des mobilisations « indignées ». À peine quatre mois plus tard, ce mouvement rassemblait 1,2 million de voix aux élections européennes de mai et décrochait cinq sièges d'eurodéputés. Vedette des réseaux sociaux, connu pour des émissions télé de débat politique (dont La Tuerka), Iglesias veut faire de Podemos une alternative aux partis de gauche traditionnels, à commencer par les socialistes du PSOE. »[2]

Comment expliquer un tel succès électoral pour un parti de gauche radicale, qui fait même concurrence aux écolo-communistes d'Izquierda Unida au sein du même groupe parlementaire européen (Gauche unitaire européenne) ? Selon Pablo Iglesias, « ce qui nous différencie, ce n'est pas tant le programme. Nous voulons un audit de la dette, la défense de la souveraineté, la défense des droits sociaux pendant la crise, un contrôle démocratique de l'instrument monétaire… Ce qui nous différencie, c'est le protagoniste populaire et citoyen. Nous ne sommes pas un parti politique, même si nous avons dû nous enregistrer comme parti, pour des raisons légales, en amont des élections. Nous parions sur le fait que les gens « normaux » fassent de la politique. Et ce n'est pas une affirmation gratuite : il suffit de regarder le profil de nos eurodéputés pour s'en rendre compte (parmi les cinq élus, on trouve une professeur de secondaire, un scientifique, etc.) ».[3]

La particularité de ce parti « nouveau genre » ne réside donc pas dans son idéologie ou son projet de société, mais dans son modèle d’organisation souple et horizontal. Il représente une « innovation politique » qui dépasse la séparation traditionnelle entre le parti et les mouvements sociaux, en traduisant les pratiques de démocratie participative et délibérative des grandes contestations populaires qui ont suivi le printemps arabe sur le plan institutionnel. Il représente en quelque sorte la « forme politique enfin trouvée » de l’émancipation populaire ; les luttes sociales et initiatives citoyennes peuvent dès lors dépasser leur méfiance du pouvoir et des partis pour construire directement et collectivement un projet politique capable de se confronter aux urnes tout en restant ancré à la base par des « cercles ».

Podemos reprend d’une certaine façon la méthode d’élaboration du programme de Québec solidaire par les « cercles citoyens », mais utilise pleinement les nouvelles technologies de communication par une démarche inspirée du modèle collaboratif de Wikipédia. Cela permet d’inclure un nombre beaucoup plus élevé de citoyen.nes, tout en réduisant substantiellement le temps nécessaire à ce processus participatif, qui fut capable d’élaborer une plateforme pour les élections européennes en moins d’un mois ! Cette structure légère est l’un des atouts majeurs du mouvement qui lui permet de s’organiser efficacement, sans négliger le lien entre les urnes et la rue, ni entre le monde virtuel et les assemblées locales organisées dans des espaces publics de proximité.

Une interface pas comme les autres

« Bien qu’il soit à l’initiative de la liste électorale, le mouvement politique Podemos s’est développé en Espagne via des « cercles » formés sur les réseaux sociaux. Des assemblées de quartier, des universitaires ou des partis anti-capitalistes sont à l’origine de ces regroupements virtuels. Pas de nombre minimum de participants, pas besoin d’affiliation, ni de donner son identité seulement un nom et une adresse mail suffisent pour faire partie d’un cercle. À la veille des élections, 400 cercles virtuels s’étaient constitués de manière spontanée. Le parti Podemos n’a pas de bâtiment ni de lieux physiques. Les rencontres et assemblées se programment sur Internet et se font dans la rue sur des places. Mauro Fuentes, directeur d’une multinationale spécialiste en réseaux explique dans un article d’El Pais qu’« Internet fait partie de son ADN. Le parti vit grâce aux réseaux sociaux, mais ne les utilisent pas comme un moyen de propagande, sinon comme un moyen pour s’organiser ». Un guide sur la création de cercles est disponible sur le site du parti et la démarche à suivre est similaire à l’organisation et au fonctionnement des assemblées du mouvement du 15M. Les cercles peuvent être reproduits et dissouts facilement. »[4]

Enfin, il est temps de concevoir le parti comme une interface entre les citoyens et l’État, soit un dispositif qui permet des échanges et interactions entre différents acteurs. En chimie, une interface est une surface entre deux produits où ont lieu des phénomènes comme la catalyse, ce qui résonne avec la conception gramscienne du parti comme « expérimentateur historique des conceptions du monde », ou l’« élaborateur des intellectualités nouvelles et intégrales ». En géographie enfin, une interface est un espace permettant la mise en relation de deux espaces ou territoires ; c’est une zone de contact entre deux pays ou régions, qui accélère les échanges économiques et culturels (nous reviendrons sur cette signification). Tout se passe comme si les anciens partis politiques possédaient des interfaces désuètes, lourdes et lentes, verrouillées à la libre appropriation des usagers ; ce sont des « logiciels propriétaires » qui se mettent à jour périodiquement sans faciliter pour autant leur utilisation.

Le problème avec les grands partis comme le NPD ou le Bloc québécois, ce n’est pas tant que leur projet politique soit démodé (il est toujours possible de renouveler le discours) ; c’est leur structure même qui est périmée. Il est temps que les partis porteurs d’une nouvelle vision du monde prennent acte du potentiel révolutionnaire du logiciel libre, en tant que modèle de transformation des modes d’organisation politique. Il faut ouvrir un chantier de recherche théorique et pratique sur l’« ergonomie politique », c’est-à-dire « l’étude scientifique de la relation entre l’homme et ses moyens, méthodes et milieux de travail »[5], et l’application de ces connaissances à la conception de nouvelles organisations politiques « qui puissent être utilisées avec le maximum de confort, de sécurité et d’efficacité par le plus grand nombre »[6]. L’ergonomie politique est elle-même liée au « design institutionnel », c’est-à-dire l’activité créatrice à vocation sociopolitique qui vise à inventer, façonner, améliorer et faciliter l’usage ou le fonctionnement des institutions, qui interagissent avec les individus et les groupes par le biais d’interfaces matérielles, symboliques et virtuelles.

Vertu pratique du sens commun

Mais la forme d’organisation ne saurait expliquer à elle seule la popularité du mouvement Podemos, qui a su adapter son discours à la conscience populaire. Son programme cherche à « construire la démocratie » à travers six axes intelligibles qui renvoient à la réappropriation et la conquête de l’économie, la liberté, l’égalité, la fraternité, la souveraineté et la Terre. Le cœur de Podemos est de redonner du pouvoir d’agir aux gens, de favoriser l’émergence d’une véritable souveraineté populaire et citoyenne contre l’establishment par la participation directe des citoyen.nes. L’analyse de Pablo Iglesias révèle à ce titre un déplacement de la logique classique de la gauche, basée sur le schéma de la « lutte de classes » qui oppose bourgeois et prolétaires, marché et État, vers un antagonisme « populiste » ou « républicain » au sens de Machiavel, c’est-à-dire entre les grands qui veulent dominer, et le peuple qui veut être libre, c’est-à-dire ne pas être dominé. Le conflit sous-jacent à l’instauration d’un autogouvernement populaire passe donc entre les grands et les petits, le 1% et le 99%, les patriciens et la plèbe, l’oligarchie et la démocratie radicale.

« L'axe fondamental pour appréhender la situation politique n'est plus l'axe gauche-droite. Je suis de gauche, mais l'échiquier politique a changé. Le déclic en Espagne a été le mouvement du « 15-M » (en référence au 15 mai 2011, date du surgissement des « Indignés »). L'alternative se définit désormais entre la démocratie et l'oligarchie, entre ceux d'en haut et ceux d'en bas, entre une caste de privilégiés qui a accès aux ressources du pouvoir et une majorité sociale. L'enjeu, pour nous, c'est de convertir cette majorité sociale en majorité politique et électorale. Nous voulons dire des choses simples : on est contre la corruption, contre l'absence d'un vrai contrôle démocratique sur l'économie, pour que les riches paient des impôts. On pense qu'il est possible de construire une majorité sur ces sujets, pour changer les règles du jeu. C'est ce qu'il se passe depuis 15 ans en Amérique latine : la contestation du libéralisme ne s'est pas tant faite sur une base idéologique que sur des thématiques nationales-populaires. Ce schéma peut aussi fonctionner en Europe. Le pouvoir n'a pas peur de l'unité des gauches, mais de l'unité populaire. »[7]

La question nationale devient en quelque sorte le catalyseur de la question sociale, car elle ancre le projet de société dans une volonté d’indépendance politique et économique. Inversement, le projet de souveraineté nationale se dissocie d’une élite politique et économique nationaliste pour rejoindre directement la souveraineté populaire, qui vise rien de moins que la transformation de la société. Pour reprendre l’expression de Kant, « des idées progressistes sans contenu national-populaire sont vides ; la souveraineté nationale sans justice sociale et démocratie véritable est aveugle ». Le « populisme de gauche » représente ainsi un puissant opérateur discursif qui trace un antagonisme fondamental et intelligible pour le plus grand nombre. Un bon exemple de ce populisme émancipateur se retrouve dans la typologie binaire de Roméo Bouchard, qui permet de distinguer simplement les riches et les pauvres :

« Ceux que j’appelle les riches sont ceux qui prétendent créer la richesse et se croient justifiés d’imposer leur loi à tout le monde : les grandes entreprises, les banquiers, les assureurs, la mafia, ceux qui gagnent 20 fois, 100 fois, 300 fois le revenu moyen. Ce sont les gros, les puissants, l’aristocratie, l’oligarchie. Ceux qui créent la richesse et font marcher l’économie sont bien plus, selon moi, les travailleurs sous-payés et les consommateurs endettés, les écoles publiques qui développent et transmettent les connaissances, les services publics, les familles, les artistes, les contribuables qui paient les subventions et les crédits d’impôt aux entreprises, nos ressources qu’on leur cède pour moins que rien,
nos ancêtres et les Premières Nations qui ont exploré, défriché et habité notre territoire, l’Univers et ses milliards d’atomes et d’étoiles qui tournent et inventent le monde depuis toujours. […] Comme on l’a dit pour Albert Camus, j’ai la chance d’être né pauvre. Je n’ai jamais été et je ne serai jamais dans le club. J’ai toujours été du côté du monde, du peuple, des petits, des régions. »[8]

Nationalisme et internationalisme

Or, l’effectivité du discours populiste ne repose-t-elle pas d’abord sur un cadre national ? La catégorie de « peuple » sur laquelle est fondée l’idée de « nation » n’est-elle pas incompatible avec la perspective internationaliste ? La gauche radicale est-elle fondamentalement hostile à la question de la souveraineté nationale, comme l’a trop souvent montré certains marxistes orthodoxes qui rejetaient toute forme d’identité autre que la classe sociale ? Relisons à ce titre le Manifeste du Parti communiste qui montre un discours beaucoup plus nuancé sur la question : « En outre on a accusé les communistes de vouloir abolir la patrie, la nationalité. Les ouvriers n'ont pas de patrie. On ne peut leur prendre ce qu'ils n'ont pas. Comme le prolétaire doit en premier lieu conquérir le pouvoir politique, s'ériger en classe nationale, se constituer lui-même en nation, il est encore par là national, quoique nullement au sens où l'entend la bourgeoisie. »[9]

Le Québec, qui n’est pas encore un pays, reste alors une patrie à faire, à conquérir par le développement d’une classe nationale, c’est-à-dire d’une majorité sociale unifiée en peuple. Cela suppose le développement d’une volonté collective opposée à l’élite politique et économique, qu’elle soit nationale ou internationale. Ce « nationalisme populaire » se distingue donc du « nationalisme bourgeois ou conservateur », qui privilégie une grande coalition nationale masquant les rapports de domination entre les riches et les pauvres, et ouvrant ainsi la porte à la construction d’un nouvel État pseudo-démocratique associé à un partenariat libre-échangiste qui enlève tout véritable pouvoir au peuple sur la vie politique et économique. L’édification de la souveraineté nationale ne peut être dissociée de la solidarité entre peuples, qui doivent combattre ensemble les classes dominantes qui les oppriment respectivement ou simultanément.

« Déjà les démarcations nationales et les antagonismes entre les peuples disparaissent de plus en plus avec le développement de la bourgeoisie, la liberté du commerce, le marché mondial, l'uniformité de la production industrielle et les conditions d'existence qu'elle entraîne. Le prolétariat au pouvoir les fera disparaître plus encore. Son action commune, dans les pays civilisés tout au moins, est l'une des premières conditions de son émancipation. À mesure qu'est abolie l'exploitation de l'homme par l'homme, est abolie également l'exploitation d'une nation par une autre nation. Du jour où tombe l'antagonisme des classes à l'intérieur de la nation, tombe également l'hostilité des nations entre elles. »[10]

Nous n’avons qu’à changer l’expression « prolétariat » par « unité populaire » et « antagonisme de classes » par « conflit entre le peuple et l’oligarchie » pour marquer les nouveaux sujets politiques. Cela suppose de porter une attention particulière à l’échelle nationale, qui n’est pas refermée sur elle-même mais s’ouvre sur une perspective internationaliste. Gramsci apporte ici un correctif important à la pensée marxiste, car il ne considère pas le développement économique international comme le prélude d’une révolution prolétarienne qui pourra abolir le capitalisme et donc l’impérialisme ; au contraire, il voit dans la lutte nationale-populaire (décolonisatrice) un moyen de lutter contre l’impérialisme et de forger une véritable solidarité internationale qui pourrait accélérer, idéalement, le renversement du capitalisme.

 « Le point qu’il me semble nécessaire de développer est celui-ci : que selon la philosophie de la praxis (dans sa manifestation politique), soit dans la formulation de son fondateur, mais surtout dans la mise au point du plus récent de ses grands théoriciens, il faut considérer la situation internationale dans son aspect national. En fait le rapport « national » est le résultat d’une combinaison « originale » unique (dans un certain sens) qui doit être comprise et conçue dans cette originalité et cette unicité si on veut la dominer et la diriger. Certes le développement va en direction de l’internationalisme, mais le point de départ est « national », et c’est de ce point de départ qu’il faut partir. Mais la perspective est internationale et ne peut être que telle. »[11]

Toutefois, l’échelle nationale n’est pas simplement donnée parce qu’elle repose sur un sol raboteux, un « développement inégal et combiné » qui doit être unifié par l’action politique. Il faut donc rejeter à la fois l’internationalisme abstrait (friand de citoyenneté mondiale) et le nationalisme abstrait (repli sur une identité collective déjà constituée), pour adopter une approche multiscalaire qui vise la reconstruction d’une conscience nationale visant une véritable souveraineté populaire. Gramsci note que l’originalité de cette stratégie « consiste à épurer l’internationalisme de tout élément vague et purement idéologique (au mauvais sens du terme) pour lui donner un contenu de politique réaliste. C’est dans le concept d’hégémonie que se nouent les exigences de caractère national. […] Une classe de caractère international, dans la mesure où elle guide les couches sociales strictement nationales (les intellectuels), et même souvent moins encore que nationales, particularistes et municipalistes (les paysans), doit « se nationaliser », dans un certain sens, et ce sens doit d’ailleurs être compris de façon assez large, parce que avant que ce forment les conditions d’une économie selon un plan mondial, il faut traverser les phases multiples où peuvent entrer des combinaisons régionales (de groupes de nations) variées. »[12]

Où nous amènent toutes ces réflexions sur le Mouvement 5 étoiles et Podemos, le rôle de l’interface et de l’ergonomie politique, le populisme de gauche, le rapport entre nationalisme et internationalisme ? Tous ces exemples concrets et ces considérations théoriques montreront leur fécondité en éclairant une situation historique particulière, à savoir la reconfiguration potentielle de la gauche à l’échelle locale, nationale et fédérale, par une double perspective nationaliste et internationaliste qui rassemble les peuples québécois, canadien et autochtones dans une lutte commune contre l’État pétrolier canadien et la création d’une réelle souveraineté populaire exercée à même un nouveau véhicule politique.

À suivre.




[2] Pablo Iglesias (Podemos): « Nous ne voulons pas être une colonie de l'Allemagne », entretien par Ludovic Lamant, 20 juin 2014. http://www.mediapart.fr/journal/international/200614/pablo-iglesias-podemos-nous-ne-voulons-pas-etre-une-colonie-de-lallemagne
[3] Ibid.
[4] De la rue à toile jusqu’aux urnes : « Podemos ». http://emi-cfd.com/echanges-partenariats/?p=3591
[5] Extrait de la définition adoptée par le IVe Congrès international d'ergonomie (1969).
[6] Extrait de la définition de l'ergonomie retenue par la Société d'Ergonomie de Langue Française.
[7] Pablo Iglesias : « Nous ne voulons pas être une colonie de l'Allemagne ».
[8] Roméo Bouchard, Constituer la démocratie, p.23,33
[9] Karl Marx, Friedrich Engels, Manifeste du Parti communiste, 1848, Les classiques des sciences sociales, p.22
[10] Ibid., p.22
[11] Antonio Gramsci, Guerre de mouvement et guerre de position, p.244
[12] Ibid., p.244-245